L’OBO immobilier : Un levier de transmission efficace ?

La détention de biens immobiliers, longtemps considérée comme une stratégie patrimoniale avantageuse, subit aujourd’hui une fiscalité de plus en plus lourde : imposition des revenus fonciers au barème progressif, IFI, hausse des frais de notaire, fin du dispositif Pinel.

Par ailleurs, 2025 pourrait être la dernière année pour profiter des abattements pour durée de détention sur les plus-values immobilières. Un amendement visant leur suppression a été proposé lors du PLF 2025, bien qu’il n’ait pas été retenu. Cependant, une nouvelle tentative pourrait intervenir d’ici la fin de l’année, avec un risque accru d’adoption pour 2026.

Dans ce contexte, certains propriétaires cherchent des alternatives pour restructurer leur patrimoine sans pour autant se défaire de leurs actifs immobiliers. L’une des stratégies envisageables est l’OBO immobilier (Owner-Buy-Out immobilier).

L’OBO immobilier repose sur la cession du bien à une société contrôlée par le propriétaire, souvent financée par un emprunt. Cette opération permet de mobiliser des liquidités, réduire la pression fiscale personnelle et préparer la transmission du patrimoine.

Mais cette approche est-elle réellement avantageuse ? Quels sont les bénéfices concrets et les points de vigilance à anticiper ? Cette analyse propose un éclairage sur les opportunités et les limites de l’OBO immobilier.

OBO IMMOBILIER

1. Pertinence et intérêt de la mise en place d’un OBO immobilier

L’OBO immobilier est souvent réduit à une simple opération de vente à soi-même. Pourtant, ce montage peut répondre à des objectifs patrimoniaux, financiers et fiscaux concrets, à condition qu’il soit mis en place avec une réelle substance économique. Son intérêt ne réside pas uniquement dans une optimisation fiscale, mais bien dans une réorganisation intelligente du patrimoine, permettant de pérenniser l’actif immobilier tout en libérant des liquidités.

1.1. Un outil patrimonial au service de la transmission

L’un des principaux attraits de l’OBO immobilier est qu’il permet de préserver un bien au sein du noyau familial, en l’intégrant dans une structure sociétaire adaptée, comme une SCI ou une holding patrimoniale. Cette approche présente plusieurs avantages :

Anticiper la transmission 🔄👨‍👩‍👧‍👦 : en transférant la nue-propriété des titres de la société aux enfants tout en conservant l’usufruit ainsi les parents préparent la succession tout en gardant le contrôle.

Éviter l’indivision successorale 🚫🏠 : contrairement à une détention en direct, l’OBO facilite le partage entre héritiers sans nécessiter de revente du bien.

Protéger l’actif 🔒💰: l’immobilier détenu en société bénéficie d’une gouvernance encadrée et évite les conflits de gestion en cas de pluralité d’ayants droit.

1.2. Un levier financier pour diversifier son patrimoine

Le recours à l’OBO immobilier permet de tirer parti de l’effet de levier du crédit, un outil particulièrement efficace dans un contexte où le financement immobilier reste accessible.

Grâce à cette opération :

  • Le propriétaire cédant dégage des liquidités 🏠💸 tout en conservant l’usage économique du bien, lui permettant ainsi de financer d’autres projets.
  • Il peut réorienter une partie de son capital vers d’autres investissements 🔄💰 (placements financiers, participation dans des sociétés, etc.), réduisant ainsi la concentration du patrimoine sur un seul actif immobilier.

1.3. Une réponse aux nouvelles contraintes fiscales

Si l’OBO immobilier est pertinent pour les patrimoines conséquents et ceux souhaitant réduire leur fiscalité personnelle. Il devient particulièrement stratégique face à l’incertitude entourant le maintien, à compter de 2026, du régime actuel des plus-values immobilières et des abattements pour durée de détention.

Dès lors, l’OBO peut représenter une alternative intéressante pour :

  • ❌ Éviter une fiscalité confiscatoire en cas de vente et conserver l’actif tout en restructurant son mode de détention.
  • 📉 Réduire l’imposition personnelle en optant pour une imposition à l’IS dans le cadre d’une société.
  • 💰 Faciliter le remboursement du prêt et renforcer la trésorerie : en société à l’IS, l’amortissement du bien génère une économie d’impôt qui constitue une source de liquidités supplémentaires. Ces liquidités peuvent servir à rembourser l’emprunt contracté par la société et pour le surplus à être réinvesties dans d’autres actifs patrimoniaux.

2. Exemple concret d'un OBO immobilier

Monsieur Bonfilon, âgé de 57 ans, est père de trois enfants (Quentin, Manon et Paul).

➡️ Il souhaite organiser sa transmission et faciliter la gestion de son bien locatif.

OBO IMMOBILIER - VENTE A SOI MEME EXEMPLE SCHEMA 1 - TZE AVOCAT

Situation initiale

Monsieur Bonfilon est l’unique propriétaire d’un bien immobilier locatif.

Situation intermédiaire

Monsieur Bonfilon constitue une SCI avec ses enfants et lui cède son bien immobilier, s’acquittant ainsi de l’impôt sur la plus-value immobilière*.

La SCI prend en charge les frais d’acquisition du bien (émoluments du notaire et droits d’enregistrement) et souscrit un emprunt pour financer le prix de vente, qui sera versé à Monsieur Bonfilon.

📌 Remarque : dans cette opération, Monsieur Bonfilon peut également opter pour une donation-partage de la nue-propriété de ses parts de SCI tout en se réservant l’usufruit. Si aucune donation n’a été réalisée au cours des 15 dernières années, la transmission bénéficiera de l’abattement de 100 000 € par parent et par enfant.
*Il n’y aura pas d’impôt sur la plus-value si le bien est détenu depuis plus de 30 ans.
OBO IMMOBILIER - VENTE A SOI MEME EXEMPLE SCHEMA 2 - TZE AVOCAT
OBO IMMOBILIER - VENTE A SOI MEME EXEMPLE SCHEMA 3 - TZE AVOCAT

Situation finale

 Les loyers perçus par la SCI permettent de rembourser l’emprunt.

Monsieur Bonfilon conserve librement les liquidités issues de la vente du bien immobilier.

Après analyse, il apparaît que dans ce cas précis, il est préférable de soumettre la SCI à l’impôt sur les sociétés (IS).

💡 En présence de parts de SCI démembrés : Après le décès de Monsieur Bonfilon, les enfants deviennent pleins-propriétaires de la SCI sans payer de droits de succession.

Cet exemple démontre que l’OBO immobilier revêt de nombreux avantages. Toutefois, sa mise en œuvre doit répondre à une logique économique avérée pour éviter tout risque de remise en cause par l’administration fiscale. Il convient ainsi d’anticiper les critères de substance, de justifier des objectifs poursuivis et de s’assurer que cette opération s’inscrit dans une véritable stratégie de gestion du patrimoine

3. Identification des points de vigilance

📌 L’abus de droit fiscal (Art. L64 et L64A du Livre des procédures fiscales)

L’administration fiscale peut requalifier une opération OBO immobilier en abus de droit si son objectif principal est fiscal. L’article L.64 du LPF permet de sanctionner les actes dont le seul but est d’éluder l’impôt, avec une majoration de 80 % des droits dus. Cependant, la jurisprudence a précisé que l’OBO peut être validé si des justifications autres que fiscales sont clairement établies.

Dans un arrêt du 27 janvier 2011 (CE, n°320313), le Conseil d’État a validé un OBO en soulignant que l’intervention bancaire et l’existence d’une véritable activité économique excluaient la qualification d’abus de droit. Plus récemment, dans un arrêt du 8 février 2019 (CE, n°407641), la revente d’un bien à une SCI détenue par les enfants a été contestée, mettant l’accent sur l’importance d’un intérêt propre à la société.

Depuis le 1ᵉʳ janvier 2020, l’article L.64 A renforce la procédure d’abus de droit pour les opérations à finalité principalement fiscale, rendant essentiel de démontrer des objectifs autres que fiscaux dans le montage.

📌 Réalité de l’existence de la SCI

Une SCI sans activité réelle (absence de réunion des organes sociaux, non paiement effectif du prix d’acquisition, absence d’autonomie financière,….) peut être considérée comme fictive. Si l’opération vise à se louer un bien à soi-même après la vente, il existe également un risque de requalification  et de rejet des charges déduites .

📌 Justification d’un intérêt économique durable

Un OBO est valide s’il répond à un objectif patrimonial et financier réel, comme l’amélioration des conditions de financement ou l’optimisation de la transmission. Si le seul but est fiscal, l’administration peut le contester. 

📌 Évaluation du bien immobilier

Un prix sous-évalué peut entraîner un redressement sur les plus-values ou l’IFI, tandis qu’un prix surévalué peut être requalifié si son seul but est d’obtenir un financement excessif. L’administration peut alors refuser la déduction des charges liées au prêt ou invoquer un acte anormal de gestion.

📌 Droit de préemption

Un OBO implique une vente qui peut être soumise à un droit de préemption public (mairie) ou privé (locataire). Ce risque doit être anticipé pour sécuriser l’opération.

📌 Protection contre les créanciers

L’OBO ne peut pas être utilisé pour organiser l’insolvabilité des cédants. Les créanciers peuvent agir en justice (action paulienne) pour faire annuler l’opération s’ils prouvent qu’elle a été réalisée à leur détriment.

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4. Conclusion

Entre contraintes juridiques, fiscales et financières, la mise en place d’un OBO immobilier peut s’avérer complexe pour le cédant.

S’entourer d’un avocat fiscaliste permet non seulement d’identifier les opportunités et les écueils de l’opération, mais aussi de structurer le projet et de coordonner l’intervention des différents acteurs (banquier, notaire, expert-comptable). Une approche sécurisée et maîtrisée qui facilite la réussite de l’opération.

Maître Thibault ZEGRE est à votre disposition pour évaluer l’intérêt de l’OBO immobilier. Que ce soit pour préparer une succession, optimiser votre fiscalité ou restructurer votre patrimoine, il vous accompagnera dans les aspects juridiques et fiscaux complexes de ce montage.

ℹ️ FAQ : Vos questions, nos réponses

L’OBO immobilier consiste, pour un particulier, dans le rachat d’un actif immobilier par une société (généralement civile) contrôlée, le financement étant assuré par un emprunt bancaire.

Avantages non fiscaux :

  • Réorganisation du patrimoine : L’OBO permet de réinvestir le prix de la cession dans de nouveaux projets, optimisant ainsi la gestion du patrimoine.
  • Transmission facilitée : La valeur des titres peut être réduite grâce à l’endettement de la société, facilitant ainsi la transmission à moindre coût.
  • Contrôle sur la gestion : Le propriétaire conserve un pouvoir indirect sur la gestion des biens immobiliers, tout en facilitant la transmission de l’actif.

Avantages fiscaux :

  • Déduction des intérêts d’emprunt : Les intérêts sur l’emprunt contracté pour l’achat des biens peuvent être déduits fiscalement.
  • Travaux déductibles : Les travaux réalisés sur les biens peuvent être déduits, créant un potentiel de déficit fiscal à constater.

En résumé, l’OBO immobilier permet une réorganisation efficace du patrimoine, facilite la transmission tout en maintenant un contrôle, et offre des avantages fiscaux intéressants comme la déduction des intérêts d’emprunt et des travaux.

  1. Audit préalable : Analyse complète de la situation juridique, patrimoniale, financière et fiscale du propriétaire. Cela inclut l’étude des objectifs de l’opération, la rentabilité de l’opération, ainsi que la sécurisation fiscale du projet.

  2. Établissement de la stratégie : Mise en place d’un rétroplanning pour définir la chronologie des opérations (évaluation des biens immobiliers, constitution de l’apport ou cession, éventuelles donations…), ainsi que la mission de chaque intervenant dans le processus (avocat, notaire, expert-comptable, évaluateur, etc…).

  3. Obtention du financement : Présentation du projet à la banque, négociation des modalités de financement (prêt amortissable ou in fine, taux, durée, garanties proposées) et des contreparties éventuelles demandées par l’établissement bancaire.

  4. Mise en œuvre des opérations : Création d’une structure ad hoc, cession par le propriétaire du ou des biens immobiliers à la société, et réalisation d’éventuelles donations.

  5. Gestion des aspects fiscaux et juridiques : Rédaction adaptée des statuts de la société, réalisation des formalités juridiques nécessaires, et intégration de clauses spécifiques dans l’acte de donation (liste non exhaustive).

Les biens les plus adaptés à une opération OBO sont généralement des biens immobiliers générant des revenus locatifs réguliers, tels que des immeubles de rapport ou des bureaux, ainsi que des actifs immobiliers présentant un potentiel de valorisation intéressant. Cette opération est particulièrement avantageuse pour les biens détenus à titre personnel depuis une certaine durée, car elle permet de bénéficier des abattements pour durée de détention. Plus d’informations sur ce régime sont disponibles ici : Service Public.

  • Risques juridiques :

    • Droit de préemption : Le bien cédé peut être soumis à un droit de préemption (commune, SAFER, locataires, etc.), notamment si sous-évalué.
    • Action paulienne (Art. 1167 du Code civil) : En cas de vente sous-évaluée, les créanciers peuvent remettre en cause la vente pour fraude à leurs droits.
    • Fictivité de la SCI (Art. 1321 du code civil) : La société peut être jugée fictive si elle manque de substance, exposant l’opération à des sanctions.
  • Risques fiscaux :

    • Abus de droit (Art. L64 et L64A du Livre des procédures fiscales) : L’administration peut contester l’opération en démontrant la fictivité de la SCI ou une minoration abusive du prix de vente, ou encore sur la base de la fraude à la loi dès lors qu’elle démontre que l’opération d’OBO a été mise en place pour des considérations exclusivement ou principalement fiscales, entraînant la remise en cause des avantages fiscaux.
    • Non-déductibilité des intérêts d’emprunt : Si l’emprunt est considéré comme un prêt à la consommation, la déduction des intérêts peut être refusée.
    • Non-déductibilité de la dette d’emprunt pour l’IFI (Art. 973 du Code général des impôts) : L’emprunt contracté pour l’acquisition d’un bien dans un OBO peut ne pas être pris en compte pour réduire la base taxable de l’IFI, sauf si l’acquisition est justifiée par des considérations économiques et non fiscales.

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